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Loi du 5 avril 1910

sur les retraites ouvrières et paysannes

Le Sénat et la Chambre des Députés ont adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

TITRE 1er
CONSTITUTION DES RETRAITES

Article 1er - Les salariés des deux sexes de l'industrie, du commerce, des professions libérales et de l'agriculture, les serviteurs à gages, les salariés de l'Etat, qui ne sont pas placés sous le régime des pensions civiles ou des pensions militaires, et les salariés des départements et des communes bénéficieront, dans les conditions déterminées par la présente loi, d'une retraite de vieillesse.

Article 2 - La retraite de vieillesse est constituée par des versements obligatoires et facultatifs des assurés, par des contributions des employeurs et par des allocations viagères de l'Etat.

Les versements obligatoires des salariés, comme les contributions des employeurs, sont établis sur les bases suivantes :

Les versements annuels seront de neuf francs (9 fr.) pour les hommes, six francs (6fr.) pour les femmes et quatre francs cinquante centimes (4 fr. 50) pour les mineurs au-dessous de dix-huit ans, soit par journée de travail : trois centimes (3 c.), deux centimes (2 c.) et 1 centime cinq millièmes (1 c. 5.).

La retraite est constituée à capital aliéné ; toutefois, si l'assuré le demande, les versements prélevés sur son salaire seront faits à capital réservé.

La contribution de l'employeur reste exclusivement à sa charge, toute convention contraire étant nulle de plein droit.

Un règlement d'administration publique déterminera la situation des salariés qui travaillent à façon, aux pièces, à la tâche ou au domicile.

Article 3 - Les versements des salariés sont prélevés sur le salaire par l'employeur lors de chaque paye.

Chaque assuré reçoit gratuitement une carte personnelle d'identité, ainsi que des cartes annuelles destinées à l'apposition de timbres constatant les versements effectués obligatoirement pour son compte ou facultativement par lui-même.

Le montant total du prélèvement et de la contribution patronale est représenté par un timbre mobile que l'employeur doit apposer sur la carte de l'assuré.

Pour les salariés intermittents, les versements obligatoires seront effectués sur la base de versements mensuels, dans les conditions qui seront déterminées par un règlement d'administration publique, sans pouvoir dépasser les limites fixées au paragraphe 3 de l'article 2 de la présente loi.

Les sociétés de secours mutuels, les caisses d'épargne ordinaires et les autres caisses prévues à l'article14 de la présente loi peuvent se charger de l'encaissement des versements obligatoires ou facultatifs de leurs adhérents, si ceux-ci en font la demande.

Elles peuvent recevoir d'avance les versements obligatoires des assurés, à condition de les inscrire sur leurs cartes avec une mention spéciale.

Dans ce cas, les employeurs s'acquittent de leurs contributions par l'apposition d'un timbre mobile.

Un règlement d'administration publique déterminera dans quelles conditions les sociétés de secours mutuels et les autres caisses devront justifier de l'encaissement des cotisations et du versement qu'elles seront tenues d'en faire à la caisse des dépôts et consignations.

Ceux qui justifieront être déjà adhérents et payer leur cotisation à une société de secours mutuels ou de prévoyance faisant la retraite ; ceux qui justifieront avoir contracté un engagement pour l'achat ou la construction d'une habitation à bon marché, ou pour l'acquisition d'une petite propriété (champ ou jardin), conformément aux conditions des lois des 30 novembre 1891, 30 avril 1894, 12 avril 1896 et 10 avril 1898 pourront être autorisés à continuer à appliquer à ces œuvres les versements personnels auxquels ils seront tenus par la présente loi.

Ils conserveront le bénéfice de la contribution des employeurs et la subvention complémentaire de l'Etat.

Article 4 - L'allocation viagère de l'Etat est fixée à soixante francs (60 fr.) à l'âge de soixante-cinq ans.

Pour être admis au bénéfice de cette allocation, l'assuré devra justifier qu'il a effectué au moins trente versements annuels atteignant, y compris ses versements facultatifs, le chiffre fixé à l'article 2.

Si le nombre des années de versements est inférieur à trente et supérieur à quinze, l'allocation sera calculée d'après le nombre des années de versements, ledit nombre multiplié par 1 fr. 50.

Les deux années de service militaire obligatoire entrent en ligne de compte pour la détermination du montant de l'allocation viagère.

Pour les assurés de la période transitoire ayant au moins trente-cinq ans accomplis au moment de la mise en vigueur de la loi, le nombre des années de versements exigées pour avoir droit à l'allocation de soixante francs (60 fr.) sera égal au nombre des années écoulées depuis la mise en vigueur de la loi, à condition que lesdits assurés justifieront qu'au moment de la mise en vigueur de la loi, ils faisaient partie, depuis trois ans au moins, des catégories de l'article 1er .

Si le montant des versements annuels effectués n'atteint pas, y compris les versements facultatifs de l'assuré, le total des versements fixés par l'article 2, l'allocation sera l'objet d'une réduction proportionnelle.

Le capital constitutif de l'allocation est versé au compte du bénéficiaire à la caisse nationale des retraites pour la vieillesse.

D'autre part, pour les assurés ayant plus de quarante-cinq ans lors de l'entrée en vigueur de la présente loi, l'allocation viagère sera portée aux chiffres suivants par des bonifications annuelles ordonnancées sur les crédits inscrits au budget du ministère du travail :

64 à 65 ans

100 fr.

63 à 64 ans

98 fr.

62 à 63 ans

96 fr.

61 à 62 ans

94 fr.

60 à 61 ans

92 fr.

59 à 60 ans

90 fr.

58 à 59 ans

88 fr.

57 à 58 ans

86 fr.

56 à 57 ans

84 fr.

55 à 56 ans

82 fr.

54 à 55 ans

80 fr.

53 à 54 ans

78 fr.

52 à 53 ans

76 fr.

51 à 52 ans

74 fr.

50 à 51 ans

72 fr.

49 à 50 ans

70 fr.

48 à 49 ans

68 fr.

47 à 48 ans

66 fr.

46 à 47 ans

64 fr.

45 à 46 ans

62 fr.

Article 5 - L'âge normal de la retraite est de soixante-cinq ans.

Tout assuré pourra, à partir de cinquante-cinq ans, réclamer la liquidation anticipée de sa retraite ; mais dans ce cas, l'allocation viagère accordée par l'Etat sera aussi l'objet d'une liquidation reportée au même âge et réduite en conséquence.

Les assurés de la période transitoire seront également admis au bénéfice de la liquidation anticipée, si, pendant les cinq années qui auront précédé la liquidation de la retraite, ils ont appartenu aux catégories de l'article 1er et s'ils ont versé, chaque année, pendant cette période, des sommes au moins égales au montant des versements obligatoires prévus à l'article 2.

Article 6 - Si un assuré encore astreint aux obligations de la présente loi décède avant d'être pourvu d'une pension de retraite de vieillesse, il est alloué :

1° A ses enfants âgés de moins de seize ans : une somme de cinquante francs (50 fr.) par mois pendant six mois, s'ils sont au nombre de trois ou plus ; cinquante francs (50 fr.) par mois pendant cinq mois, s'ils sont au nombre de deux ; cinquante francs (50 fr.) par mois pendant quatre mois, s'il n'y en a qu'un seul ;
2° A la veuve sans enfants de moins de seize ans, cinquante francs (50 fr.) par mois pendant trois mois.

En cas de divorce, les mêmes avantages seront alloués à la femme non remariée quand le divorce aura été prononcé aux torts exclusifs du mari.

Les veuves d'origine française des salariés étrangers visés à l'article 11, soit sans enfants, soit avec un ou plusieurs enfants, bénéficient des dispositions précédentes, si elles sont naturalisées, elles et leurs enfants, dans l'année qui suit le décès de l'époux et, le cas échéant, à condition que la naturalisation des enfants soit intervenue dans les conditions prévues par l'avant-dernier alinéa de l'article 9 du code civil modifié par la loi du 26 juin 1889 et par l'article 1er de la loi du 5 avril 1909.

Les allocations prévues aux paragraphes précédents ne seront acquises aux ayants-droit que si l'assuré décédé a effectué les trois cinquièmes des versements obligatoires prévus à l'article 2.

Article 7 - Le bénéfice de la loi du 14 juillet 1905 sera étendu aux personnes visés à l'article 1er âgées de soixante-cinq à soixante-neuf ans au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi et reconnues admissibles aux allocations de la loi d'assistance ; mais les sommes qui leur seront attribuées seront limitées à la moitié des allocations accordées par l'application de cette dernière loi et seront à la charge exclusive de l'Etat.

Toutefois, les sommes attribuées chaque année ne pourront être supérieures à cent francs (100 fr.).

Un règlement d'administration publique déterminera les conditions spéciales dans lesquelles seront dressées les listes des bénéficiaires du présent article, ainsi que la composition et les attributions des commissions chargées de statuer sur les allocations et sur les recours.

Article 8 - Les bénéficiaires de l'article 1er garderont les avantages prévus par l'article 20 de la loi du 14 juillet 1905.

La retraite acquise par les versements des salariés et les contributions patronales sera considérée comme provenant de l'épargne, la rente étant calculée à cet effet comme si tous les versements avaient été effectués à capital aliéné.

Article 9 - Les assurés qui seront atteints, en dehors des cas régis par la loi du 9 avril 1898, et à l'exclusion de toute faute intentionnelle, de blessures graves ou d'infirmités prématurées entraînant une incapacité absolue et permanente de travail auront droit, quel que soit leur âge, à la liquidation anticipée de leur retraite.

La constatation de cette incapacité sera faite dans les conditions et formes déterminées par un règlement d'administration publique.

La retraite liquidée sera bonifiée par l'Etat, dans les conditions fixées par ce règlement, au moyen de crédits spéciaux, annuellement ouverts à cet effet par la loi de finances, sans que la bonification puisse dépasser soixante francs (60 fr.) de rente, ni la retraite devenir supérieure au triple de la liquidation ou excéder trois cent soixante francs (360 fr.), bonification comprise.

Article 10 - Les agents, employés et ouvriers des grandes compagnies de chemin de fer d'intérêt général et de l'administration des chemins de fer de l'Etat, les ouvriers et employés des mines et les inscrits maritimes demeurent respectivement soumis aux législations spéciales qui les régissent.

Il en sera de même des agents, employés et ouvriers des chemins de fer d'intérêt général secondaires, des chemins de fer d'intérêt local et des tramways. Toutefois, si les dispositions établies en leur faveur par les exploitants dans les conventions passées, s'il y a lieu, entre ces derniers et l'Etat, les départements ou les communes intéressées sous l'approbation des ministres des travaux publics et de l'intérieur donnée après avis du ministre du travail, ne devaient pas leur assurer une retraite au moins égale à celle résultant de la présente loi, celle-ci leur serait applicable dans les conditions qui seront fixées par un arrêté concerté entre le ministre des finances, le ministre des travaux publics et le ministre du travail.

Les caisses de retraites ou les règlements de retraites dont bénéficient actuellement les salariés de l'Etat qui ne sont pas placés sous le régime des pensions civiles ou des pensions militaires et les salariés des départements et des communes pourront être maintenus par décrets rendus sur la proposition des ministres du travail et des finances et du ministre compétent.

De nouvelles caisses ou de nouveaux règlements de retraite pourront être institués dans les mêmes conditions.

Les salariés dont la rémunération annuelle dépasse trois mille francs (3.000 fr.) ne seront pas soumis aux obligations de la présente loi. Ceux dont la rémunération annuelle atteindra trois mille francs (3.000 fr.) cesseront de faire partie de la liste des assurés, mais ils conserveront leurs droits acquis.

Article 11 - Les salariés étrangers travaillant en France sont soumis au même régime que les salariés français.

Toutefois, ils ne peuvent bénéficier des contributions patronales et des allocations ou bonifications budgétaires que si des traités avec les pays d'origine garantissent à nos nationaux des avantages équivalents.

Lorsqu'il n'y a pas lieu à application de l'alinéa précédent, les contributions patronales sont affectées à un fonds de réserve.

Sont également affectées au fonds de réserve les contributions patronales correspondant à l'emploi des salariés français dont la retraite est déjà liquidée.

Les chefs d'industrie qui auront constitué chez eux des caisses de retraites patronales autorisées comme il est dit à l'article 19, seront tenus de verser au fonds de réserve la contribution patronale afférente à ceux de leurs salariés qui, par application des deux paragraphes précédents, ne pourraient bénéficier de cette contribution.

Article 12 - Les tarifs des retraites sont calculés pour chacune des caisses visées à l'article 14 dans des conditions déterminées par un règlement d'administration publique rendu sur la proposition des ministres du travail et des finances, après avis du conseil supérieur des retraites ouvrières, d'après le taux d'intérêt des placements de chaque caisse et provisoirement d'après la table de mortalité de la caisse nationale des retraites pour la vieillesse.

Le taux d'intérêt est gradué par décime.

Des décrets rendus sur la proposition des ministres du travail et des finances arrêteront, sur le vu des statistiques établies par le ministre du travail, de nouvelles tables de mortalité pour les retraites de vieillesse régies par la présente loi, ainsi que des tables de mortalité spéciales pour la liquidation des retraites anticipées d'invalidité.

Les tarifs ne comportent pas de prorata au décès. Ils ne comprennent que des âges entiers, les versements étant considérés comme effectués par les intéressés à l'âge qu'ils ont accompli au cours de l'année dans laquelle les versements sont reçus par l'organisme d'assurance.

Les tarifs ne comportent pas de chargements pour les frais d'administration des divers organismes ; il y est pourvu par une allocation forfaitaire par compte d'assuré ayant donné lieu dans l'année à des opérations de recettes ou de dépenses.

Cette allocation comprendra :

1° Une remise de cinq pour cent (5 p. 100) pour les frais d'encaissement et d'envoi des fonds à l'établissement assureur ;
2° Une indemnité d'un franc (1 fr.) pour le fonctionnement de l'assurance vieillesse.

Elle sera payée chaque année au moyen du fonds de réserve visé à l'article 16 et subsidiairement au moyen d'un crédit ouvert au budget du ministère du travail.

Les caisses d'épargne, les sociétés de secours mutuels et les syndicats qui seront admis par les ministres du travail et des finances, dans les conditions déterminées par un règlement d'administration publique, à se charger des encaissements de cotisations pour l'une des caisses visées à l'article 14 sont soumis, pour ces encaissements, au contrôle financier du ministre des finances.

Article 13 - Lorsque la retraite en cours d'acquisition dépasse cent quatre-vingt francs (180 fr.), l'assuré peut à toute époque, et après examen médical, affecter la valeur en capital du surplus, soit à une assurance en cas de décès, soit à l'acquisition d'une terre ou d'une habitation qui deviendra inaliénable et insaisissable, dans les conditions déterminées par la législation sur la constitution d'un bien de famille insaisissable.

Article 14 - Les comptes individuels des assurés sont ouverts à leur choix dans l'une des caisses ci-après :

1° Caisse nationale des retraites pour la vieillesse, dont la gestion continue à être assurée dans les conditions de la loi du 20 juillet 1886 par la caisse des dépôts et consignations, sous le contrôle de la commission de surveillance placée auprès de cette caisse et qui ouvrira dans ses écritures une section spéciale pour les opérations afférentes à la présente loi ;
2° Sociétés ou unions de sociétés de secours mutuels dans les conditions spécifiées à l'article 17 ;
3° Caisses départementales ou régionales de retraites instituées par décret et administrées par des comités de direction composés pour un tiers de représentants du Gouvernement, pour un tiers de représentants élus des assurés et pour le troisième tiers de représentants élus des employeurs ;
4° Caisses patronales ou syndicales de retraites ;
5° Caisses de syndicats de garantie liant solidairement les patrons adhérents pour l'assurance de la retraite ;
6° Caisses de retraites de syndicats professionnels.

Les caisses prévues aux cinq derniers alinéas ci-dessus relèvent du ministre du travail. Elles jouissent de la personnalité civile et sont soumises au contrôle financier du ministre des finances, dans les conditions qui seront déterminées par un règlement d'administration publique. Leurs fonds sont employés en placements prévus à l'article ci-après.

Chaque caisse, dans le premier semestre de chaque année, délivre gratuitement aux assurés un bulletin indiquant le total des versements obligatoires et facultatifs qu'elle a reçus l'année précédente, ainsi que le montant de la retraite éventuelle à soixante-cinq ans, atteinte au 31 décembre de l'année précédente.

Article 15 - Pour l'application de la présente loi, la gestion financière des divers organismes visés à l'article précédent est confiée à la caisse des dépôts et consignations, qui effectue gratuitement leurs placements moyennant le simple remboursement des droits et frais de courtage ou d'acquisition.

Un règlement d'administration publique, rendu sur la proposition du ministre des finances et du ministre du travail, après avis de la commission de surveillance de la caisse des dépôts et consignations, détermine les mesures d'exécution relatives à la gestion financière.

Les placements sont effectués :

1° en valeurs de l'Etat ou jouissant de la garantie de l'Etat ;
2° en prêts aux départements, communes, colonies ou pays de protectorat, établissements publics, chambres de commerce, et en obligations foncières ou communales du Crédit foncier ;
3° sur l'avis favorable du conseil supérieur des retraites ouvrières prévu ci-après et jusqu'à concurrence d'un quatre centième en acquisitions de terrains incultes à reboiser ou de forêts existantes ;
4° sur l'avis favorable du conseil supérieur des retraites ouvrières, et jusqu'à concurrence du dixième en prêts aux institutions visées par l'article 6 de la loi du 12 avril 1906 et aux institutions de prévoyance et d'hygiène sociales reconnues d'utilité publique, ou en prêts hypothécaires sur habitations ouvrières ou jardins ouvriers, ainsi qu'en obligations de sociétés d'habitations à bon marché établies conformément à la même loi du 12 avril 1906.

Les sommes non employées seront versées en compte courant au Trésor dans les limites d'un maximum et à un taux fixés annuellement par la loi de finances. Les placements seront opérés sur la désignation de chaque caisse intéressée. La caisse des dépôts et consignations ne pourra se dispenser d'exécuter les ordres d'achat ou de vente adressés par les caisses visées aux n° 2 à 6 du premier paragraphe de l'article précédent, sauf à les fractionner, s'il y a lieu, suivant la situation du marché et sauf avis contraire de la section permanente du conseil supérieur des retraites ouvrières, en ce qui concerne les ordres de vente.

Article 16 - Le fonds de réserve visé aux articles 11 et 12 est alimenté :

1° Par les versements prévus à l'article 11 ;
2° Par les amendes prévues à l'article 23 et par les versements des greffes visés au même article ;
3° Par les arrérages retenus aux rentiers en application de la prescription de cinq ans, conformément à l'article 2277 du code civil ;
4° Par la portion non employée annuellement du revenu visé à l'article 4 de la loi du 31 décembre 1895 ;
5° Par les dons et legs qui peuvent être faits par l'Etat avec affectation audit fonds.

Ce fonds de réserve est déposé à la caisse des dépôts et consignations, qui en fait emploi dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article 15, et ses disponibilités sont comprises dans le maximum visé à l'avant-dernier alinéa dudit article. Les prélèvements sur ce fonds prévus à l'article 12 sont effectués sur l'ordre du ministre du travail.

TITRE II
RETRAITES ASSUREES PAR LES SOCIETES DE SECOURS MUTUEL, LES CAISSES DEPARTEMENTALES OU REGIONALES, LES CAISSES PATRONALES OU SYNDICALES, LES SYNDICATS DE GARANTIE ET LES SYNDICATS PROFESSIONNELS

Article 17 - Toute société ou union de sociétés de secours mutuels, libre ou approuvée, qui a été préalablement agréée à cet effet par décret rendu sur la proposition du ministre du travail et du ministre des finances, est admise à assurer directement pour ses sociétaires les retraites prévues par la présente loi. Ces retraites bénéficient de tous les avantages qui y sont spécifiés.

L'agrément ne peut être refusé qu'aux sociétés ou unions ne remplissant pas les conditions générales déterminées par un règlement d'administration publique rendu sur la proposition des ministre du travail et des finances.

En cas de refus d'agrément dans les trois mois de la demande, un recours peut être formé devant le Conseil d'Etat, sans ministère d'avocat et avec dispense de tout droit. L'agrément ne peut être retiré que par décret rendu sur avis conforme de la section permanente du conseil supérieur des retraites ouvrières et sauf recours devant le Conseil d'Etat dans les conditions sus énoncées.

Les sommes déposées par les sociétés à la caisse des dépôts et consignations en exécution de la présente loi formeront un fonds de retraite distinct et aliénable et les sociétés ne bénéficieront à raison de ces versements ni des subventions de l'Etat prévues par la loi du 1er avril 1898, ni de la bonification d'intérêt prévue par la loi de finances du 31 mars 1903.

Article 18 - Indépendamment de l'allocation prévue à l'article 12, les sociétés de secours mutuels reçoivent de l'Etat une allocation annuelle d'un franc cinquante centimes (1 fr. 50), réduite à soixante-quinze centimes (0 fr. 75) pour les assurés de moins de dix-huit ans, qui sera affectée à un dégrèvement de pareille somme sur la cotisation maladie de l'assuré. Toutefois, cette allocation n'est pas attribuée si la cotisation versée pour l'assurance contre la maladie est inférieure à six francs (6 fr.) ou à trois francs (3 f.) si l'assuré a moins de dix-huit ans.

Les syndicats professionnels qui constituent une caisse d'assurance maladie et une caisse d'invalidité et de retraites régies par la loi du 1er avril 1898 dans les conditions réglées par l'article 19 de la présente loi, bénéficieront des avantages stipulés dans le paragraphe précédent.

Article 19 - Un règlement d'administration publique rendu sur la proposition des ministre du travail et des finances déterminera les conditions de constitution et de fonctionnement des caisses départementales ou régionales, des caisses patronales ou syndicales, des caisses de syndicats de garantie solidaire et des caisses de syndicats professionnels visées à l'article 14.

Un décret rendu sur la proposition des ministre du travail et des finances autorisera la constitution de chaque caisse.

Les employeurs et les salariés qui adhèrent aux caisses patronales ou syndicales ou à des caisses de syndicats de garantie solidaire visées au présent article peuvent être dispensés par le décret qui en autorisera la constitution, des versements prévus à l'article 2, à la condition que les pensions soient au moins égales à celles qui seraient obtenues dans les mêmes périodes en vertu de la présente loi.

Ils seront en tout cas dispensés des appositions de timbres prévues par l'article 3 de la présente loi.

Si les caisses patronales ou syndicales reçoivent des employeurs des cotisations supérieures aux contributions fixées à l'article 2, elles sont tenues seulement de capitaliser au compte de chaque salarié la partie de la cotisation correspondant la contribution obligatoire, et peuvent, avec le surplus, soit constituer des réserves, soit accorder des avantages supplémentaires aux bénéficiaires ou à leur famille dans les conditions déterminées par leurs statuts approuvés.

Les salariés ne pourront valablement s'engager à adhérer à une autre caisse patronale ou syndicale pour une période supérieure à celle pendant laquelle ils appartiennent à l'entreprise affiliée à la caisse patronale ou à une des entreprises affiliées à la caisse syndicale.

Indépendamment des placements prévus par l'article 15, les fonds des caisses patronales ou syndicales prévues au présent article pourront être employés en prêts garantis par premières hypothèques sur les immeubles appartenant aux entreprises auxquelles correspondent lesdites caisses et jusqu'à concurrence seulement de la moitié de leur valeur.

Tous les actes relatifs aux prêts dont il s'agit seront exempts de droits de timbre, d'enregistrement et de toute autres taxes.

Si, du fait de l'autorisation d'une caisse patronale ou syndicale en vertu de la présente loi, il y a lieu à un transfert à cette caisse de fonds ou de valeurs passible du droit de mutation ou de toutes autres taxes, ce transfert sera exempté desdits droits et taxes.

Les syndicats de garantie solidaire sont soumis aux dispositions du présent article.

Indépendamment des placements prévus par l'article 15, leurs fonds peuvent être employés jusqu'à concurrence du tiers en immeubles situés en France et jusqu'à concurrence d'un dixième, confondu dans le tiers précédent, en commandites industrielles ou en prêts à des exploitations industrielles de solvabilité notoire et ayant leur siège en France.

Article 20 - Les décrets prévus aux articles 17 et 19 déterminent le mode de liquidation des droits éventuels des bénéficiaires en vue du transfert de la réserve mathématique correspondante à un autre des organismes visés par la présente loi, lorsque la caisse débitrice renonce à la constitution des retraites ouvrières.

Dans le cas où un assuré déclare quitter la caisse à laquelle il appartient pour s'affilier à une autre, il n'y a pas lieu à transfert immédiat. Cette opération est différée jusqu'à l'époque de l'entrée en jouissance de la pension. A ce moment, la caisse à laquelle l'assuré est alors affilié reçoit de chacune des autres caisses la réserve mathématique afférente aux portions de rentes qui y sont constituées.

En ce qui concerne les employés et ouvriers de l'Etat soumis à des régimes de retraite autres que ceux des pensions civiles ou des pensions militaires et quittant le service avant liquidation de pension, des règlements d'administration publique rendus sur la proposition des ministre du travail et des finances et du ministre intéressé détermineront, par analogie, le mode de liquidation à la charge de l'Etat de la réserve mathématique des pensions en cours d'acquisition.

TITRE III
DISPOSITIONS GENERALES

Article 21 - Les retraites et allocations acquises en vertu de la présente loi sont incessibles et insaisissables, si ce n'est au profit des établissements publics hospitaliers pour le payement du prix de journées du bénéficiaire de la retraite admis à l'hospitalisation, sauf en ce qui concerne les allocations en cas de décès.

Article 22 - Les certificats, actes de notoriété et toutes autres pièces exclusivement relatives à l'exécution de la présente loi sont délivrés gratuitement et dispensés de droits de timbre et d'enregistrement.

Un décret réglera le tarif postal applicable aux objets de correspondance adressés ou reçus pour l'exécution de la loi par la caisse nationale des retraites et par les autres caisses visées à l'article 14.

Pour les différends qui naîtraient de l'exécution de la présente loi et qui seraient déférés aux tribunaux civils, il sera procédé comme en matière sommaire et statué d'urgence.

Les recours au Conseil d'Etat contre les arrêtés ministériels statuant sur les réclamations relatives aux allocations prévues par la présente loi seront dispensés du ministère d'avocat et auront lieu sans frais.

Article 23 - L'employeur ou l'assuré par la faute duquel l'apposition des timbres, prescrite par la présente loi, n'aura pas eu lieu sera passible d'une amende égale aux versements omis, prononcée par le juge de simple police, quel qu'en soit le chiffre, sans préjudice de la condamnation, par le même jugement, au payement de la somme représentant les versements à sa charge, et qui sera porté au compte individuel de l'assuré.

L'amende sera versée au fonds de réserve. L'employeur qui a été dans l'impossibilité d'apposer le timbre prescrit pourra se libérer de la somme à sa charge, en la versant à la fin de chaque mois, directement ou par la poste, au greffier de la justice de paix ou à l'organisme, reconnu par la loi, auquel serait affilié l'assuré.

Tous les trois mois, le greffier déposera les sommes par lui touchées à la caisse des dépôts et consignations.

Article 24 - Sont passibles d'une amende de cent à deux mille francs (100 à 2.000 fr.) et d'un emprisonnement de cinq jours à deux mois :

1° Les administrateurs, directeurs ou gérants de toutes sociétés ou institutions recevant, sans avoir été dûment agréées ou autorisées à cet effet, les versements visés par la présente loi ;
2° Les administrateurs, directeurs ou gérants de tous les organismes visés au titre II en cas de fraude ou de fausse déclaration intentionnelle dans l'encaissement ou dans la gestion, le tout sans préjudice du retrait des autorisations ou des agréments prévus aux articles 17 et 19 ;
3° L'assuré ou toute personne qui aura fait disparaître des cartes annuelles les timbres dûment apposés.

L'article 463 du code pénal et la loi du 26 mars 1891 sont applicables dans les cas prévus au présent article.

Article 25 - Le ministre du travail établit la statistique de toutes les opérations effectuées en exécution de la présente loi et en résume les résultats dans un rapport annuel qui est adressé au Président de la République et qui rend compte de l'application générale de la loi.

Ce rapport est publié au Journal officiel et distribué aux Chambres.

Article 26 - Il est formé, auprès du ministre du travail, et sous sa présidence, un conseil supérieur des retraites ouvrières chargé de l'examen de toutes les questions se rattachant au fonctionnement de la présente loi.

Ce conseil est composé de :

- Deux sénateurs et trois députés élus par leurs collègues ;
- Deux conseillers d'Etat élus par le Conseil d'Etat ;
- Quatre délégués du conseil supérieur des sociétés de secours mutuels ;
- Deux délégués de la commission supérieure des caisses d'épargne ;
- Quatre délégués du conseil supérieur du travail, dont deux élus par les conseillers patrons, et deux par les conseillers ouvriers, dont un ouvrier et un employé ;
- Deux membres choisis par le conseil supérieur du commerce et de l'industrie : un parmi les patrons et un parmi les ouvriers ou employés d'exploitations agricoles ;
- Un administrateur de caisses départementales ou régionales nommé par le ministre du travail ;
- Deux personnes connues pour leurs travaux sur les institutions de prévoyance, désignées, l'une par le ministre du travail, l'autre par le ministre des finances ;
- Deux membres agréés de l'Institut des actuaires français désignés de concert par le ministre du travail et le ministre des finances.

Ces membres sont nommés pour trois ans.

Font partie de droit du conseil :

- Le directeur général de la comptabilité publique au ministère des finances ;
- Le directeur de l'assurance et de la prévoyance sociale au ministère du travail ;
- Le directeur général de la caisse des dépôts et consignations ;
- Le directeur du mouvement général des fonds et le chef du service de l'inspection générale au ministère des finances ;
- Le directeur de la mutualité au ministère du travail .

Le conseil élit ses deux vice-présidents. Il se réunit au moins une fois par semestre. Il nomme une section permanente composée :

1° De onze membres pris dans son sein, dont un sénateur, un député, un conseiller d'Etat, un délégué du conseil supérieur des sociétés de secours mutuels, deux employeurs, un ouvrier et employé du commerce et de l'industrie, un exploitant, un ouvrier agricole et un actuaire ;
2° Des membres de droit.

Le section permanente donne son avis sur les questions qui lui sont renvoyées, soit par le conseil supérieur, soit par le ministre du travail .

Article 27 - La présente loi sera applicable dans le délai fixé par la loi de finances pour 1911, qui comprendra les ressources générales nécessaires à son fonctionnement, et trois mois au moins après l'insertion des règlements d'administration publique au Journal officiel.

TITRE IV
DISPOSITIONS TRANSITOIRES

Article 28 - Les pensions déjà acquises à un titre quelconque, en vertu de contrats, et dont le service incombe à l'employeur seront fournies, comme précédemment, suivant les règlements particuliers de l'entreprise.

Article 29 - A partir de la mise en application de la présente loi, les caisses de retraite dont le service incombe à l'employeur et les caisses de prévoyance précédemment organisées par les patrons avec le concours des ouvriers et employés qui n'auront pas obtenu l'autorisation prévue à l'article 19, fonctionneront exclusivement pour l'exécution des engagements antérieurement contractés par lesdites caisses, en ce qui concerne tant les pensions acquises à un titre quelconque que les rentes et pensions de retraite en cours d'acquisition.

Toutefois, si les versements des salariés et les contributions des employeurs aux caisses de prévoyance n'équivalent pas au chiffre fixé par l'article 2 ci-dessus, ils doivent être majorés en conséquence à moins que les pensions de retraite assurées ne se trouvent supérieures à celles qui seraient obtenues en vertu de la présente loi.

Article 30 - Le capital constitutif des rentes incombant soit aux employeurs, soit aux caisses de prévoyance pourra être versé, en totalité ou par fractions successives, à la caisse nationale des retraites pour la vieillesse, qui devra, en ce cas, inscrire au compte individuel de chaque ayant droit les rentes correspondant audit capital, calculées dans les conditions prévues par la législation de cette caisse, et en effectuer le payement à partir de l'âge fixé pour l'entrée en jouissance.

Article 31 - Lorsque les caisses auront été organisées avec le concours des ouvriers et employés, les intéressés seront appelées à se prononcer, dans un délai maximum de six mois, sur les mesures à prendre à raison des engagements précités et sur le mode de réalisation des ressources nécessaires.

A défaut d'entente entre les employeurs, d'une part, et la majorité des ouvriers et employés, d'autre part, les deux parties pourront décider que le règlement des mesures à prendre et la fixation des versements à opérer seront confiés à la commission arbitrale instituée par l'article 32 ci-après.

Si les employeurs et la majorité des ouvriers et employés ne peuvent se mettre d'accord dans le délai de six mois sus indiqué, ni sur les mesures à adopter, ni sur le recours à la commission arbitrale, les tribunaux nommeront, à la requête de la partie la plus diligente, un liquidateur chargé d'assurer, au mieux des intérêts en présence, la liquidation de la caisse de prévoyance.

Le rapport du liquidateur sera soumis à l'homologation du tribunal.

Article 32 - La commission arbitrale prévue par l'article 31 sera composée de sept membres permanents nommés :

- Deux par la commission supérieure de la caisse nationale des retraites pour la vieillesse,
- Deux par le conseil supérieur des retraites prévu à l'article 26 de la présente loi,
- Deux par la Cour d'appel de Paris, parmi les conseillers de la cour,
- Un par la Cour des comptes parmi les conseillers de la cour.

La commission élira son président et son secrétaire ; elle siégera au ministère du travail ; ses fonctions seront gratuites.

Le nombre des membres de la commission arbitrale sera porté à neuf par l'adjonction, dans chaque affaire, de deux membres désignés : l'un par les employeurs, l'autre par la majorité des ouvriers et employés.

La procédure se fera sans frais d'aucune sorte ; tous actes, documents et pièces quelconques à produire seront dispensés du timbre et enregistrés gratis.

Article 33 - Pour les différends qui naîtront de l'exécution de la présente loi et qui seront déférés aux tribunaux civils, il sera procédé comme en matière sommaire et statué d'urgence.

Les bénéficiaires de la loi obtiendront, de droit, l'assistance judiciaire devant la juridiction du premier degré.

Tous actes, documents et pièces quelconques à produire seront dispensés du timbre et enregistrés gratis.

Les intéressés agissant en nom collectif seront représentés par un mandataire nommé par eux à la majorité des voix, sans préjudice, pour chacun d'eux, du droit d'intervention individuelle.

Article 34 - Un règlement d'administration publique déterminera : la procédure à suivre pour l'introduction, l'instruction et la solution des affaires soumises à la commission arbitrale ; le nombre, le mode de nomination et les attributions des auxiliaires de l'instruction ; le mode de nomination du mandataire prévu à l'article 33.

Article 35 - Les infractions aux dispositions des articles 28 à 29 qui précèdent seront punies de seize francs (16 fr.) à deux cent francs (200 fr.). En cas de mauvaise foi, le chiffre de l'amende pourra être porté à cinq cents francs (500 fr.).

L'article 463 du code pénal et la loi du 26 mars 1891 seront applicables.

TITRE V
RETRAITES DES METAYERS, FERMIERS, CULTIVATEURS, ARTISANS ET PETITS PATRONS

Article 36 - Les fermiers, métayers, cultivateurs, artisans et petits patrons qui, habituellement, travaillent seuls ou avec un seul ouvrier et avec des membres de leur famille salariés ou non, habitant avec eux, et qui voudraient se constituer une retraite ou en assurer une à ces membres de leur famille, seront admis facultativement, en opérant des versements à l'une des caisses visées par l'article 14 et dans les conditions énumérées aux paragraphes ci-après, au bénéfice d'une pension d'une pension de retraite, à l'âge de soixante-cinq ans, et au bénéfice, le cas échéant, des dispositions de l'article 18.

Pour les fermiers, cultivateurs, artisans et petits patrons, les versements annuels seront, au minimum de neuf francs (9 fr.) par assuré pour la cotisation totale et, au maximum, de dix-huit francs (18 f.). En ce qui concerne les métayers, les versements annuels seront, au minimum de six francs (6 fr.) ; ils emporteront de plein droit le versement de pareille somme par les propriétaires, à concurrence d'un maximum de neuf francs (9 fr.).

Ces versements bénéficieront, sur le fonds de l'Etat, d'une majoration allouée chaque année, à capital aliéné, au compte de l'intéressé ; cette majoration sera égale au tiers des versements effectués.

Le droit à la majoration sera épuisé lorsque la rente viagère, résultant à soixante-cinq ans des majorations versées antérieurement, aura atteint le chiffre de soixante francs (60 fr.) ou lorsque le bénéficiaire cessera de faire partie des catégories visées au présent article.

Les dispositions des paragraphes précédents sont étendues :

1° aux femmes et veuves non salariées des assurés des titres I et V ;
2° aux salariés dont le salaire annuel est supérieur à trois mille francs (3,000 fr.), mais ne dépasse pas cinq mille francs (5,000 fr.).

Pour les cultivateurs, artisans et petits patrons âgés de quarante ans au moment de la mise en vigueur de la présente loi, qui commenceront leurs versements dès cette époque et qui faisaient partie depuis trois ans au moins des catégories d'intéressés susvisées, il sera ajouté à la pension acquise résultant de leurs versements effectifs et de la majoration du tiers une bonification égale à la rente qu'eût produite un versement annuel de neuf francs (9 fr.) depuis l'âge de quarante ans jusqu'à l'âge qu'ils avaient qu'ils avaient au moment de la mise en vigueur de la loi.

Les métayers âgés de plus de quarante ans au moment de la mise en vigueur de la présente loi et qui, à partir de cette époque, effectueront des versements annuels égaux à ceux que prévoit l'article 2, recevront l'allocation viagère fixée par l'article 4 pour les assurés obligatoires.

Il en sera de même pour les fermiers du même âge qui auront rempli les mêmes conditions et fait le double versement prévu à l'article 2 sous réserve que le prix de leurs fermes ne dépassera pas le chiffre de six cents francs (600 fr.).

Si les versements annuels minima prévus au paragraphe 2 du présent article n'ont pas été effectués pendant le nombre d'années prévu aux alinéas précédents, la bonification précitée sera réduite dans la même proportion que le nombre d'années de versements.

Les avantages prévus par les articles 6, 8 et 9 de la présente loi seront accordés aux personnes visées au présent article qui, depuis la mise en vigueur de cette loi ou depuis l'âge de dix-huit ans, auront, chaque année, versé à l'une des caisses indiquées à l'article 14 la contribution minimum de neuf francs (9 fr.).

L'article 7 de la présente loi est étendu aux personnes visées au deuxième alinéa du présent article. De plus, pour ceux des intéressés de la période transitoire qui seraient à soixante ans dans les conditions requises pour bénéficier des allocations de la loi d'assistance, la bonification de l'Etat sera portée à un chiffre égal à celui de la bonification accordée aux assurés obligatoires de même âge, pourvu que les versements facultatifs de l'intéressé aient été de 18 F, pour chaque année écoulée depuis la mise en vigueur de la présente loi.

Les assurés facultatifs désignés au présent article et qui occupent des salariés faisant partie ou non de leur famille sont tenus, à l'égard de ces salariés, aux versements obligatoires des employeurs, tels qu'ils sont fixés par l'article 2 ci-dessus.

Article 37 - Si un assuré a successivement appartenu aux régimes du titre 1er et de l'article 36, l'allocation viagère prévue à l'article 4 ne peut se cumuler avec la rente résultant des majorations de l'article 36 que jusqu'à concurrence du chiffre fixé par l'article 4.

Au cas où l'assuré visé à l'alinéa précédent compte un nombre d'années de versements obligatoires inférieur à quinze, il lui est attribué, pour chacune de ces années, une rente complémentaire égale à celle qu'eût produite la majoration de ses versements obligatoires et des contributions patronales, sans que cette rente puisse dépasser un franc cinquante centimes (1 fr. 50) par année et sous la condition que le nombre total de ses années de versements dans les conditions des articles 4 et 36 soit au moins égal à quinze. S'il compte un nombre d'années de versements obligatoires supérieur à quinze et inférieur à trente, il peut parfaire ce nombre par des années de versements facultatifs en conformité de l'article 36 pour obtenir le bénéfice de l'article 4.

Les assurés visés à l'article 36, ayant trente-cinq ans accomplis au moment de l'entrée en vigueur de la présente loi, qui passeraient ensuite dans la catégorie des assurés visés au titre 1er et effectueraient des versements annuels obligatoires atteignant au moins les trois cinquièmes du chiffre fixé à l'article 2, seront soumis, pour lesdites années de versements, aux dispositions des cinquième et sixième alinéas de l'article 4, sans que toutefois l'allocation viagère puisse se cumuler avec les majorations et bonifications de l'article 36 au delà du chiffre limite fixé à l'article 4.

TITRE VI
DISPOSITIONS DIVERSES

Article 38 - Des avances remboursables peuvent être faites aux caisses départementales ou régionales concourant à l'exécution de la présente loi, pour couvrir leurs frais de premier établissement. Le remboursement de ces avances sera effectué, dans un délai qui ne pourra excéder quinze ans, par annuités égales calculées au taux du tarif de chaque caisse départementale ou régionale, pour la première année d'opérations.

Les décrets visés à l'article 19 qui autorisent les caisses départementales ou régionales à concourir au service des retraites fixeront, pour chacune de ces caisses, le maximum desdites avances remboursables.

Article 39 - Le cinquième alinéa de l'article 3 ci-dessus est applicable à la caisse nationale d'épargne postale pour l'encaissement des versements obligatoires ou facultatifs de ses adhérents, si ceux-ci en font la demande.

Article 40 - Les étrangers naturalisés n'auront droit au bénéfice des articles 4, 7 et 36 de la présente loi que s'ils ont été naturalisés avant l'âge de cinquante ans.

Article 41 - Un règlement d'administration publique, rendu sur la proposition des ministres du travail et des finances, déterminera toutes les dispositions nécessaires à l'application de la présente loi, sans préjudice des règlements spéciaux ci-dessus prévus.

Article 42 - A dater de l'entrée en vigueur de la présente loi, sont abrogées toutes dispositions contraires, notamment l'article 3 de la loi du 27 décembre 1893, et en ce qui touche les bénéficiaires de la présente loi, les dispositions de la loi du 31 décembre 1895.

La présente loi, délibérée et adoptée par le Sénat et par la Chambre des députés, sera exercée comme loi de l'Etat.

Fait à Paris, le 5 avril 1910.

Par le Président de la République:   
FALLIERES    

Le ministre du travail et de la prévoyance sociale,   
René VIVIANI   

Le ministre des finances,   
Georges COCHERY   

Fiche revue le 17/02/2010

Document N° 067

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