Techniques de réalisation des composants semi-conducteurs

 

 

 1 ‑ Nature du travail

Le problème se résume à réaliser sur un support, généralement du silicium mais pas seulement des zones parfaitement déterminées dans lesquelles on pourra faire pousser du silicium (épitaxie), introduire du dopant (diffusion, implantation), faire croître de l'oxyde, créer une connexion etc

2 - Création des zones

De façon générale, il s'agit de protéger la plaquette de silicium qui va recevoir les composants, diodes, transistors, circuits intégrés, puis de dégager des espaces qui vont faire l'objet d'un travail, le travail exécuté, il faut éliminer la protection, recouvrir d'une nouvelle protection, dégager de nouvelles zones etc  

      Le masquage

Le masquage proprement dit consiste à protéger les zones qui ne doivent pas recevoir de dopant ou d'oxyde ou autre à l'aide d'un matériau "étanche", qui pourra être une résine photosensible ou de l'oxyde de silicium (Si02).

La photo-lithogravure:

C'est Jean Hoerni ( photo de droite) qui créa le premier transistor par photo-lithogravure le 2n1613 en 1958 chez Fairchild semiconductor. Son procédé allait révolutionner la technique de fabrication des semi-conducteurs

Le processus passe d'abord par la réalisation des masques qui seront ensuite utilisés comme les typons des circuits imprimés pour l'insolation de la résine photosensible déposée sur le silicium. Le révélateur éliminera ensuite la résine qui a été ou qui n'a pas été insolée (résine positive ou négative). Le silicium après passage au révélateur se retrouve à nu à certains endroits permettant ainsi la pénétration du dopant ou toute autre opération.
C'est le procédé de photo lithographie

 Les problèmes de la photo lithographie:
Les dimensions des motifs les plus petits descendent maintenant en dessous du micron (1μm=10‑6m et même de quelques dizaines de nanomètres ) ce qui  entraîne des problèmes considérables:
 

   la diffraction de la lumière
On sait qu'un faisceau de lumière parallèle, en passant par un orifice, diverge ( diffraction de Fraunhofer), cette divergence, tangente de l'angle α, est donnée par la formule:

 

Hoerni est un ingénieur suisse né en 1924 il s'installe aux Etats Unis en 1952 où il fait la connaissance de William Schockley. Il travaille dans le laboratoire de celui-ci et le quitte avec 7 autres collègues pour créer Fairchild en 1957.En 1958 Noyce invente le Circuit intégré sur silicium et de son coté Hoerni met au point la technique de photo-lithogravure

 diffraction de la lumière traversant un orifice

 Un faisceau lumineux dont la longueur d'onde λ = 1μm (proche infrarouge) passant dans un orifice de diamètre d = 1μm aura un angle α de 50° environ . Il découle de ce phénomène que lorsque la lumière passe à travers les motifs d'un masque, un manque de netteté des ombres projetées. Pour éviter ou tout au moins réduire ce phénomène on aura intérêt à utiliser un rayonnement de faible longueur d'onde qui peut atteindre λ=0,193 μm (raie du fluorure d'argon)


    La réalisation des masques
La réalisation des masques, leur stabilité dimensionnelle et de leur positionnement lors de masquages successifs posent des problèmes considérables. La précision du positionnement à l'origine n'était pas parfaite, aussi il fallait en tenir compte sur le dimensionnement des motifs.

Au début, le masque était en verre. Réalisé à l'échelle 1 il était plaqué sur le wafer ( tranche de silicium ) enduit de résine photosensible. Exposé à la lumière, tous les futurs circuits intégrés étaient insolés en même temps.
Placer le masque sur le silicium l'endommageait rapidement, les défauts apparus sur le masque se répétaient à chaque insolation. La durée de vie d'un masque était de 25 à 50 insolations.
Ajoutons que pour réaliser un circuit intégré, chaque couche nécessite un masquage. Les premiers circuits nécessitaient 8 masques. Les techniques modernes, qui associent plusieurs millions voir centaines de millions de transistors dans un circuit, nécessitent 25 masques , ce sont  500 opérations qui peuvent s'échelonner sur un mois.
Chaque couche va entraîner une série d'opérations:
 nettoyage, séchage, dépôt de résine, cuisson de la résine, insolation, développement, nettoyage, attaque chimique, dépôt ou diffusion ou oxydation ou ..., Chaque masquage peut nécessiter 20 opérations.

Actuellement, les masques sont réalisés à l'échelle 5 une optique ramène le faisceau à la dimension normale mais les circuits sont réalisés un par un. Le wafer est fixé sur une table X-Y de grande précision, à positionnement par interférométrie laser qui déplace le silicium après chaque insolation.

Les masques peuvent être réalisés eux mêmes à l'aide d'un faisceau d'électron de 1μm de diamètre
(la longueur d'onde associée à une énergie de 10 KeV est de 1Ǻ)  les débuts de cette technique ont été effectués en détournant l'emploi d'un microscope électronique. La pièce à irradier est fixée sur une table XY de grande précision positionnée par interférométrie laser. Le faisceau d'électrons est focalisé à l'aide de lentilles électroniques mais n'insole la cible que point par point ce qui est lent

   Les sources d'insolation
       En pratique, les dimensions minimales des motifs sont voisines de la longueur d'onde du rayonnement utilisé.
La technologie 0,25 μm (taille du motif minimum) est obtenu avec une source UV de longueur d'onde λ=0,248 μm utilisant du fluorure de krypton. Des lasers à fluorure de krypton peuvent produire un rayonnement de λ=0,193 μm . Il permet d'obtenir des motifs de  0,13 μm  et même 0,09 μm
L'utilisation des UV  n'est pas sans poser de problème, les verres et même le quartz deviennent absorbants, il faut utiliser une optique en Fluorite CaF2 et même des miroirs métalliques de grande précision.
       Une technique également en cours d'étude consiste à produire un rayonnement de λ 13,5 nm en éclairant avec un laser une bille d'étain qui émet alors ce rayonnement mais actuellement la puissance de l'émission est limité à 10 Watts alors que 100 à 250 W seraient nécessaires. Les choses se compliquent du fait que le rayonnement de cette longueur d'onde n'est pas transmis par l'air, il est donc nécessaire de travailler sous vide. Il devrait être possible de réaliser des lignes espacées de 10nm

    3 - Le dopage du silicium

Pour obtenir du Silicium N on introduit un dopant de valence 5 qui pourra être de l'Antimoine, du Phosphore, de l'arsenic ou du Lithium.
Le Silicium P est obtenu par dopage avec un matériau de valence 3 tel que Gallium, Indium, Bore ou Aluminium

 Plusieurs techniques sont possibles, le monocristal peut être dopé au moment de son étirage, il s'agit évidemment d'un dopage uniforme de tout l'ensemble du monocristal. Ceci est obtenu en introduisant dans le creuset un mélange de Silicium et de dopant. Cela suppose au départ pour ces deux matériaux, des températures de fusion voisines et une solubilité du dopant dans le silicium.

     3 - 1 ‑ L'épitaxie
L'épitaxie consiste à faire croître sur du Silicium pur ou déjà dopé, du silicium dopé différemment. Les plaquettes de Silicium sont disposées dans un four à atmosphère contrôlée et portées à une température de 1200°C environ. Un mélange gazeux circule au contact avec les plaquettes. Ce gaz est un composé chimique du corps à faire croître contenant notamment, du Silicium, du dopant et de l'hydrogène. Une réaction chimique se produit et une couche croît sur le silicium véritable progression du monocristal de base. L'épaisseur des couches obtenues dépend du temps de chauffage, elles peuvent atteindre 25 μm.

     3 ‑ 2 ‑ Diffusion
La diffusion est associée à la technique de masquage, en effet, pour permettre une diffusion locale du dopant dans le Silicium, il est nécessaire de protéger les autres zones.
La plaquette de Silicium est chauffée à 1000°C environ en présence d'un gaz contenant le dopant. Ce dernier migre dans le Silicium aux endroits non protégés. Évidemment, la concentration obtenue forte en surface, décroît avec la profondeur, les zones masquées ne sont pas entièrement protégées car la migration n'est pas uniquement perpendiculaire à la surface.

Diffusion du dopant dans le silicium

Le profil de la diffusion dépend essentiellement des matériaux en présence et suit une loi non modifiable.

 Profils de diffusion de dopants dans le silicium

Le dopage par diffusion présente donc les inconvénients suivants:
     - La répartition du dopant subit une loi non modifiable
     - Le dopant diffuse sous les protections
Toutes les impuretés contenues dans le gaz diffusent dans le Silicium et pas seulement le dopant

 3 - 3  L'implantation ionique
Le procédé d'implantation ionique consiste à projeter sur le silicium des ions de dopant. Le dopant est d' abord ionisé puis accéléré par un champ électrique avec la plaquette de silicium comme cible (énergie de 30 à 200 keV ) Le faisceau d'ions est modulé et dirigé à l'aide de lentilles électroniques et de plaques de déflexion. Le faisceau peut être dirigé avec précision, le masquage devient alors inutile en outre le contrôle de l'énergie des ions permet une certaine maîtrise du profil du dopage.

Dans le cas de l'implantation ionique, le masquage n'est pas nécessaire mais en fait , les commandes qui pilotent les plaques de déflexion contiennent toutes les informations d'un masque. On parle communément de masquage électronique. Les informations sont contenues dans la mémoire de l'ordinateur qui commande la déflexion du faisceau d'ions.

Cependant, cette technique présente un inconvénient, le dopant en pénétrant dans le silicium peut créer des dislocations ( irrégularités dans l'organisation cristalline ), un recuit (chauffage uniforme de la plaquette après implantation) peut palier cet inconvénient mais il modifie le profil des dopages

En 2007 état de la technique était gravure 90 et 65nm, longueur de canal 45 ou 35 nm, épaisseur de l'oxyde moins de 4 nm, 7 à 10 niveaux d'interconnexion isolé par 1μm d'oxyde , 25 masques, 500 opérations s'étalant sur 1 mois
En 2012 Intel sort le 95xx Itanium Poulson 4 ou 8 cœurs. Il travaille à des fréquences qui vont de 1,7 à 2,5 GHz et permet 6400 Méga Transferts par seconde, consomme 130 à 170 W réunit 3,1 109 transistors. Gravure 0,032 μm surface de silicium 544 mm2  
En 2014 l'industrie des circuits intégrés à produit 250 1018 transistors (250 milliards de milliard de transistors) , 8 milliards de transistors par seconde
Aux dernières nouvelles (2015) IBM et Intel sont en lutte pour produire des circuits en gravure 14, 10 et 7 nm

Une grande partie de cette fiche est réalisée à partir de "Histoire de la microélectronique" de Philippe Matherat qu'on peut trouver sur le site;

https://cel.archives-ouvertes.fr/cel-00157199/document


Numéro de la Fiche 122
Dernière mise à jour 04-12-2015